Russell Gulley
Jackson Highway
Interview par Luc Brunot.
Traduction par Dominique Turgot et Luc Brunot.
Publié dans Bands Of Dixie n°53 (novembre - décembre 2006)
Qui se souvient de Jackson Highway ? Ce groupe de l'Alabama, sorte de croisement entre Blackfoot et Wet Willie, avait pourtant sorti un très bon disque chez Capitol en 1980. Nous avons rencontré Russell Gulley afin qu'il nous fasse mieux découvrir cette formation trop méconnue. Dans cette interview, il nous parle de son parcours, des deux disques de Jackson Highway, du légendaire producteur Jimmy Johnson, de Blackfoot, de Johnny Neel, de Chris Anderson et d'autres artistes mais aussi de son nouveau disque solo.
Bonjour Russell,
Vous êtes né en Géorgie en 1947 mais vous avez grandi dans l'Alabama. Comment était la vie musicale dans l'Alabama durant votre jeunesse ?
J'ai grandi dans une église Pentecôtiste où la musique était une partie importante du service du culte. Je chantais dans le choeur et quand j'ai été adolescent, j'ai commencé à faire partie d'un groupe de country/gospel sudiste appelé the Howell Family. On se produisait dans les églises, les écoles, etc. dans tout le Sud-Est des Etats-Unis. J'ai enregistré deux LPs (à la bonne époque des disques vinyles) avec cette formation pour le label Nugget records de Nashville (que possédaient les stars du Grand Ol' Opry, Lonzo et Oscar).
Par ailleurs, quand j'étais gamin, je connaissais aussi la musique country traditionnelle. Mon frère, Bobby Stanley (le fils d'un premier mariage de ma mère), jouait de la steel guitar comme le lui avait appris son père, "Little" Joe Stanley. Mr. Stanley était un joueur de steel local qui a travaillé pendant un moment comme sideman de Hank Williams et d'autres.
Mes influences blues sont venues, par la radio et la télévision, du rock and roll des débuts. Je connaissais Sun records et je savais qu'Elvis et d'autres artistes de ce label reprenaient des morceaux de blues. J'écoutais aussi la radio WLAC de Nashville. Leurs émissions de blues étaient diffusées tard dans la nuit et la réception était vraiment bonne sur l'autoradio de mon père.
Les premiers artistes de blues qui m'ont marqué furent Jimmy Reed, Freddy King et d'autres artistes noirs qui étaient programmés dans des émissions de rock and roll. Ensuite, je me suis tourné vers la musique soul dans les sixties et vers ce qui a trait à la soul et à la swamp music de Muscle Shoals. Des artistes comme Tony Joe White, qui était blanc mais qui jouait une putain de « funky » musique, étaient ce à quoi je pensais quand je pensais à Muscle Shoals à cette époque. Plus tard, j'ai approfondi les trucs du Delta comme Howlin' Wolf ou Muddy Waters.
Votre frère Dennis est-il plus jeune ? Plus vieux ?
Dennis est plus jeune du point de vue de l'âge mais il est souvent plus mature musicalement. Il a toujours pris une grande place dans tout ce que j'ai fait.
Comment avez-vous commencé à jouer de la musique ?
J'ai commencé à jouer de la basse à l'église, pour la chorale et ensuite avec plusieurs "garage bands" aux alentours de ma ville. On jouait dans des dancings d'adolescents du coin et des concerts de "bataille de groupes" dans un théâtre local. On voyait souvent dans ces concerts les types qui plus tard allaient devenir le super groupe de country, Alabama.
Mon (demi) frère aîné Bobby m'apprenait les accords et d'autres trucs mais le plus souvent, Dennis et moi nous nous apprenions mutuellement et on répétait les chansons dans notre chambre. Ça nous a amené à écrire plus tard des chansons ensemble.
Dennis était toujours bon à reprendre un lick ou un riff en écoutant des disques. Il est devenu meilleur techniquement et plus précis alors que je suis plus un musicien au feeling : ce qui me plait le plus, c'est quand je le sens bien. Aujourd'hui, l'attention de Dennis à tel ou tel détail lui sert beaucoup comme ingénieur d'enregistrement et comme musicien de studio. Il produit mes CDs.
En 1973, si je ne me trompe pas, vous avez déménagé à Muscle Shoals. Que faisiez-vous avant ?
Tout d'abord, pendant que j'allais à l'école, j'ai joué de la musique gospel et du rock and roll dans des "garage bands" d'adolescents. En 1969, j'ai été faire mon service militaire dans l'armée et j'ai passé un an au Vietnam. Après être retourné à la maison, Dennis jouait avec un groupe qui s'appelait Cross, sur le circuit des universités sudistes. Il rencontra un type dénommé Tony Lumpkin, qui avait travaillé avec un groupe des sixties appelé The Bleus et qui avait été produit par Eddie Hinton. Il connaissait donc les types à Muscle Shoals Sound. Ça a été le type qui nous a présenté à Jimmy Johnson.
Tony disait qu'il pensait que Jimmy serait intéressé par mes chansons. Plus tard, je suis venu pour une réunion avec Jimmy et j'ai décidé de m'installer à Shoals pour écrire pour Muscle Shoals Sound Publishing. Pendant que Dennis travaillait dans le groupe avec Tony Lumpkin, j'ai commencé à bosser sur la route avec une chanteuse de soul, Ruby Winters. Elle avait eu un gros hit en Angleterre et tout le monde préparait sa promotion aux Etats-Unis. C'est pendant que je lui servais de chef d'orchestre que j'ai eu l'appel de Dennis comme quoi Jimmy voulait me rencontrer. C'était une telle super opportunité à ne pas laisser passer que j'ai donc déménagé pour aller travailler à Muscle Shoals Sound.
Comment est né Jackson Highway ?
Pendant que Dennis était toujours sur la route avec Cross, je me suis installé à Shoals. Pour gagner ma vie, Mike O'Rear, le directeur de la compagnie de publication, m'a aidé à trouver un boulot dans un "house band" au Johnny's Club, juste de l'autre côté de la frontière du Tennessee (Muscle Shoals était dans un comté sec à l'époque. Tous les bars étaient là haut).
Nous avons mis sur pied un groupe constitué des auteurs compositeurs de MSS (Muscle Shoals Sound) avec l'objectif de nous créer un moyen de nous aider pendant que nous composions. De plus, le groupe devait être capable de faire des démos des chansons. Un bon plan pas cher pour MSS et un bon moyen pour nous, auteurs compositeurs, d'avoir rapidement des démos.
Quelques temps plus tard, j'étais au bureau parlant avec JJ (Jimmy Johnson), c'était habituel pour moi. Lui et moi, on discutait souvent sur la direction, l'écriture et plus tard, après que Highway soit sur la route, je servais souvent de contact entre le groupe et JJ.
Un certain jour, comme nous discutions de la situation actuelle, Jimmy a reçu un coup de fil de Dennis. JJ venait juste de me demander si j'avais jamais pensé à jouer de nouveau dans un groupe avec Dennis. Bien sûr, j'avais espéré ça très fort. Quand JJ m'a passé le combiné, Dennis m'a dit qu'il ne pensait pas que son groupe, Cross, allait y arriver et il m'a demandé si je voulais en commencer un avec lui. Je lui ai dit d'accord mais qu'il serait plus facile s'il rejoignait mon groupe au club parce qu'on avait un engagement stable, en plus du fait qu'on vivait à Muscle Shoals. Dennis a rejoint mon groupe. Ce groupe était constitué de tous les membres originaux de Jackson Highway plus un gars, un organiste, Gerald Morrison, qui est parti rapidement après ça. Ses cinq membres ont ensuite été ensemble presque treize ans.
Une chose plus intéressante pour moi est le fait que juste avant l'appel de Dennis, Johnson avait discuté avec moi de noms de groupes. Je n'avais rien de particulièrement bon et Jimmy m'a demandé : « Que penses-tu de Jackson Highway ? ». J'ai dit oui sans hésitation. C'était un honneur de sentir qu'il ressentait fortement mon talent, assez fortement pour me donner une telle appellation légendaire.
Quelles étaient les influences du groupe ?
On écoutait pas mal de trucs en tant que groupe. Dennis et moi, quand on était gosses, on était fans des Beatles (comme le reste du monde). Britt (le guitariste) a dit une fois qu'il était influencé par les formations de cuivres comme Blood Sweat and Tears et Tommy (claviers) écoutait de la musique classique. J'ai toujours vraiment été tourné vers les artistes de Sun records comme Jerry Lee Lewis, Charlie Rich et Elvis.
Je me souviens que Tommy et moi étions vraiment intéressés par Delbert et Glen, notre premier contact avec Delbert McClinton. Frank Zappa aussi. Un autre groupe qui nous influençait tous était les Allman Brothers. Ils étaient pour nous du "rock sudiste" avant Lynyrd Skynyrd. Aujourd'hui, ils sont toujours notre plus grande référence.
Comme auteur, j'admirais Bernie Tarpin mais j'aimais aussi vraiment le style d'écriture de Delbert.
Presque tout ça, c'était avant que je n'aille à "l'école" à Shoals. J'ai pu assister aux sessions, du début à la fin de "Prone To Lean" de Donnie Fritts, produites par Jerry Wexler et kris Kristofferson, dans le vieux studio 3614. Donnie est devenu tout de suite une influence et il m'a familiarisé plus directement à l'écriture de Hinton, Fritts, Tony Joe White, etc. Ça a été à ce moment là que Tommy et moi on a commencé tous les deux à vraiment penser en terme de style des premiers auteurs compositeurs de Muscle Shoals. J'étais familier avec beaucoup de leurs "hits" mais la conception globale de leur travail a commencé à avoir plus de signification pour moi.
En 1977, vous avez sorti un premier LP ("Jackson Highway)" sur MSS records, produit par Jimmy Johnson et David Hood. Il a été enregistré entre 1975 et 1977. Pourquoi une si longue période ?
Tous les premiers enregistrements ont été fait de démos de chansons que nous avions écrites pour la compagnie de publication. Le matériel ne convenait pas vraiment aux artistes, on les a donc enregistré là. Ces morceaux étaient peut-être plus notre répertoire, sans style commercial. On n'était certainement pas Skynyrd ou Blackfoot ou Percy Sledge.
Finalement, comme on était devenu un "band" plutôt qu'un groupe d'auteurs compositeurs, on avait besoin d'enregistrer pour nous aider à trouver du boulot. On a donc regroupé les démos et sorti notre premier LP.
Comment définiriez-vous le style musical de ce premier LP ?
Il était très éclectique. Il y avait de la country à la Delbert and Glen et même une reprise de leur version de "Everyday Will Be A Holiday" de William Bell. Il y avait aussi du rock comme "Hook Line And Sinker", influencé par le fait de regarder jouer Rickey Medlocke et Blackfoot.
Peut-être que c'était trop éclectique pour attirer l'attention d'une compagnie discographique. On l'a donc sorti nous même.
Jouiez-vous les mêmes choses sur scène (que sur le disque) ? Quels étaient vos set-lists ?
Ouais, on jouait presque tout le disque en live. On a vraiment toujours été un groupe très live.
On jouait dans pas mal de clubs et, dans les seventies, dans le Sud-Est, un groupe devait toujours jouer pas mal de reprises. On reprenait donc tout ce qui venait de ACDC, Aerosmith, les Allman Brothers, Parliament Funkadelic, tout autant que Jerry Lee Lewis.
Ouais, vraiment éclectique, avant même que je ne sache que ce mot fut dans le dictionnaire.
Le groupe donnait-il beaucoup de concerts ?
Pendant treize ans, on a joué quatre à cinq jours par semaine : clubs, associations, premières parties de groupes comme Blackfoot, même B.J. Thomas et une fois Iron Butterfly. On était sur la route pour six à huit semaines d'affilée.
Le second disque, c'était en 1980 ("Jackson Highway" sur Capitol). Qu'avez-vous fait entre les deux disques ?
On était sur la route. Comme "manager", mon accord avec JJ était de garder le groupe réuni jusqu'à ce qu'on obtienne un contrat. En tant que groupe, on vivait en attendant ce jour, en espérant qu'un label important nous amène là où on rêvait d'être : un groupe de rock à succès avec tous ses à-côtés.
Comment avez-vous passé contrat avec Capitol ?
Jimmy continuait à nous vanter partout là où il pouvait trouver quelqu'un qui pouvait nous écouter. Avec la "nouvelle vague" et la vogue des cravates en cuir, un groupe de rock sudiste aux longs cheveux n'était pas ce qui était recherché par la plupart. Je pense qu'on arrivait à la fin d'une époque. L'avion de Skynyrd s'était écrasé et beaucoup pensaient que Jackson Highway était un autre Skynyrd. On ne s'est jamais vu ainsi. De toute façon, tout en ayant un contrat avec MSS studios, Jackson Highway a été signé pour faire un premier album pour le label MSS/Capitol. Delbert, Russell Smith, Lenny LeBlanc, Frankie Miller et Levon Helm, tous on fait des enregistrements à partir de cet accord.
Est-ce que Lynyrd Skynyrd a été une influence pour le groupe ?
On a d'abord entendu parler de Skynyrd quand Jimmy Johnson nous a emmené pour la première fois à Muscle Shoals Sound au 3614. Il passait les enregistrements qu'il avait fait pour le groupe. On pensait qu'ils étaient vraiment bons mais on essayait de faire notre propre truc. Donc, au début, je ne me suis pas particulièrement intéressé à eux. Pas de la même manière qu'aux Allman Brothers.
Plus tard, après avoir rencontré le groupe (et ils sont même venus jouer avec nous lors de l'une de nos prestations en club), j'ai commencé à écouter plus le "songwriting" de Ronnie. C'est là que j'ai vraiment commencé à les apprécier. À cette époque, un groupe ne pouvait jouer dans les clubs du Sud sans jouer quelques morceaux de Skynyrd. Plus que d'avoir été influencé, j'estime plutôt que j'étais un peu envieux d'eux. Ils avaient ce que je voulais... un contrat avec un label majeur.
Votre style n'est pas très éloigné de certains disques du label Capricorn. Avez-vous eu des contacts avec eux avant leur faillite ?
Mon frère Dennis avait eu plus de contact avec eux au début. Quand on était à Shoals, toute la création de notre répertoire était faite par Jimmy Johnson. En fait, quand on a sorti notre premier LP sur le label MSS, Johnson a demandé que si quelqu'un semblait s'intéresser à nous, il fallait l'adresser à lui, en tant que manger.
Capricorn savait qui on était de par leurs relations avec Johnson plus que par un contact direct avec nous.
Wet Willie était de l'Alabama. Étaient-ils une influence pour vous ? Étiez-vous en contact avec eux ?
On connaissait Wet Willie dès le début (le LP "Dripping Wet"). Ils jouaient le même circuit que Cross (le groupe de Dennis) mais on n'a jamais été proches. J'ai rencontré différents membres ces dernières années et j'ai joué avec Lewis, le batteur, dans les Beat Daddys. Je serais plus sûrement influencé maintenant par Jimmy Hall. C'est un tel chanteur d'exception ! Son "Rendez-vous With The Blues" est un tellement grand disque. Le son qu'il a sur les pistes acoustiques de cet enregistrement était exactement ce que j'espérais obtenir sur mon CD "Back To The Swamp". En fait, Jack Pearson était le guitariste que je voulais embaucher pour mes sessions à cause de son travail sur le disque de Jimmy.
Les musiciens sont les mêmes (que sur le premier LP), cela signifie-t-il que le groupe était très uni ?
Ouais, c'est sûr qu'on était des frères. On a traversé pas mal de galères ensemble et on vivait constamment sur la route, partageant une petite camionnette, des chambres de motels sans personne d'autre depuis sept ans à l'époque. On voulait tous ce mélange.
On était pauvres, on n'avait jamais d'argent et on n'avait jamais de filet de sécurité à part les autres membres. On partageait tout ce qu'on avait, c'est-à-dire rien sauf le rêve.
Ce LP, toujours produit par Johnson et Hood, sonne plus rock que le MSS. Est-ce que ça reflète une évolution du groupe ou est-ce juste une question de production ?
La production a certainement eu une grande importance à ce sujet mais comme groupe on avait définitivement grandi. On était passé en sept ans d'un groupe d'auteurs compositeurs sans direction à un groupe de musiciens affamés qui travaillait tout le temps sur la route. On avait vu la compétition et on payait le prix pour être dans la détermination et la persévérance. On avait aussi vu ce qu'un enregistrement devait être pour s'imposer en réalisant le premier LP nous-mêmes et en travaillant chaque aspect, de la promotion à la réservation de dates. On avait peu d'aide. Il n'y en avait pas beaucoup qui croyaient en nous mais JJ oui et il y avait un large culte dans le Sud-Est.
Pourriez-vous nous parler des légendaires producteurs Jimmy Johnson et David Hood. Quel était leur travail ?
C'était super de travailler avec eux. Il n'y avait jamais aucune pression et ils nous ont appris comment enregistrer, tout comme ils l'avaient fait avec Skynyrd auparavant. Ils croyaient dans les groupes et ils sentaient que si nous pouvions apprendre à nous produire nous-mêmes, ensuite nous pourrions apprendre à survivre. Le rêve était d'être complets... auteurs-compositeurs, producteurs et musiciens... comme les Beatles.
Très rarement, Jimmy essayait de nous dire comment être ou quoi écrire. Nous avons sélectionné les morceaux que nous voulions faire, ensuite nous avons enregistré les morceaux. On voulait voir lesquelles allaient survivre. Ils voulaient nous laisser essayer nos idées sans les critiquer. Ils étaient d'esprit très ouverts.
Ça pourrait expliquer pourquoi ça a pris tant de temps pour avoir un contrat ou pour qu'ensemble on gagne en volume. Mais ils voulaient que ce soit authentique... ils le voulaient pour qu'on soit nous-mêmes.
Johnson était un grand prof. Il allait dans son bureau tandis que David enregistrait les premières tentatives avec nous. Ensuite, quand on pensait qu'on était prêt, David demandait à Jimmy de venir. Avec des oreilles neuves, il écoutait notre travail et nous disait "ouais" ou "non". Il n'était jamais négatif, toujours positif et tous les deux étaient des auditeurs, des musiciens qui travaillaient avec nous.
Comment étaient les sessions d'enregistrement ?
Les sessions d'enregistrement étaient avant tout des expériences d'apprentissage et ça se passait au légendaire studio 3614 Jackson Highway. On essayait les morceaux pendant que David écoutait, nous aidait avec l'équalisation et mettait en place le bon son des instruments, bien que parfois ce fut Jimmy dans ce premier rôle. Après une prise ou deux, l'autre producteur venait avec des oreilles fraîches, il regardait comment l'enregistrement sonnait pour lui et il donnait quelques idées et/ou des directions. Ensuite, on continuait à enregistrer jusqu'à ce que, tous, on sente que les bandes étaient vraiment à garder et ont passait alors à une autre chanson.
Habituellement, on travaillait deux ou trois morceaux à la fois, sauf lorsqu'on a fait le disque Capitol/MSS [NDLR : le second donc]. Ce disque a été enregistré en passant deux semaines à enregistrer les pistes de base (toutes les chansons étaient déjà choisies et Jimmy nous laissait, les auteurs, choisir les morceaux à enregistrer). Ensuite, on a passé deux semaines à enregistrer les overdubs (principalement des parties de guitare), puis deux autres semaines pour le chant et les choeurs et, enfin, après d'une semaine à dix jours de congés pour permettre à nos oreilles de se reposer, Dennis, David et Jimmy mixèrent les sessions. Ça a été une vraie leçon d'enregistrement pour Dennis et le savoir-faire développé pendant cette expérience influe toujours sur ses techniques d'enregistrement actuelles.
Le second LP a été enregistré avec les équipements à 1000 Alabama Avenue. C'était le nouveau ou "second" Muscle Shoals Sound, un studio à la pointe, sur les rives de la rivière Tennessee.
Vous avez repris ici, sur ce second disque, deux titres du premier album. Pourquoi ?
Le premier enregistrement était une réalisation indépendante qui n'a probablement jamais eu la promotion qu'elle méritait pour avoir une chance de succès. Ceci du fait de finances limitées et parce que je ne m'y connaissais pas assez. Il y avait deux morceaux, "Circles", un des favoris de Jimmy Johnson, et "Hook, Line and Sinker", une chanson forte qui allait bien en live et qu'on voulait re-graver pour Capitol/MSS.
Les musiciens de Blackfoot apparaissent sur "Rock And Roll Man". Comment cela est-il arrivé ?
Ces mecs étaient sur la route et sont passés par Muscle Shoals et il est arrivé qu'ils sont passé au studio pendant qu'on enregistrait "Rock And Roll Man", un titre enregistré par George Jackson, l'auteur de "Old' Time Rock And Roll", enregistré par Bob Seger. C'est sûr qu'ils savaient jouer le rock et ils ont eu la générosité d'accepter de jouer sur ce morceau.
À ce sujet, la version originale de "Old' Time Rock and Roll", envoyée à Seger, avait été faite avec Dennis au chant et Britt à la guitare. Jimmy nous avait offert le morceau pour notre premier enregistrement mais il était déjà en pressage. Dennis a suggéré d'envoyer ce titre à Seger. L'enregistrement final de Seger a toujours les parties de guitare de Britt.
On voulait enregistrer une chanson de George Jackson (qui est, de manière justifiée, une légende) et "Rock and Roll Man" était un grand plus pour notre disque, spécialement avec Blackfoot.
Les deux premier LPs de Blackfoot ont été enregistrés à Muscle Shoals. Étiez-vous à ces sessions ?
Oui. J'étais en fait plutôt envieux du "foot" parce que je pensais qu'ils essayaient de mettre Jackson Highway sous l'éteignoir. En fait, Jackson Highway n'était alors pas prêt.
Jackson Spires nous stupéfiait tous. Ils ont dû clouer sa grosse caisse sur le sol pour pouvoir continuer à enregistrer et le sous-sol du 3614 est là où se trouve la loge des artistes. C'était un sérieux "tonnerre" pendant ces sessions.
Tout le groupe était si affûté ; ainsi qu'un critique/écrivain l'a noté, presque trop affûté. Juste une machine de rock. Les guitares étaient aussi stupéfiantes. Ricky était une rock star en devenir.
Le "foot" est devenu un grand supporter de Jackson Highway et, plus tard, quand on a signé avec Capitol, Medlocke nous a mis en contact avec son agent de réservation pour notre première tournée nationale avec Ted Nugent, UFO et Triumph.
Ces relations ne vous ont pas permis, avant ou après le contrat avec Capitol, d'entrer en contact avec Atco records ?
Non, le rock sudiste passait des temps difficiles pendant les eighties et bien que Blackfoot fut occupé, Al Nalli (leur manager) travaillait très durement pour qu'ils aient du boulot. Bien qu'il ait parlé de manière très positive de Jackson Highway, une de mes dernières conversations avec lui après avoir migré à Nashville l'a amené à me confier qu'il se pouvait que Ricky cherche des opportunités en solo et Nalli considérait même que Nashville pouvait être une issue pour lui.
Avez-vous pris quelque chose pour Jackson Highway de cette expérience avec Blackfoot ?
Ben ouais en quelque sorte mais Blackfoot et Jackson Highway étaient vraiment deux espèces différentes. Dennis et moi ne sommes pas des guitaristes comme Ricky et, en conséquence, les chansons que nous écrivons ne sont pas aussi orientées guitares. Elles sont menées par le chant et les paroles.
Les expériences du business diffèrent d'un artiste à l'autre. Jimmy Johnson m'a toujours dit de ne pas mesurer les succès ou les échecs par la réussite d'autres artistes et je ne l'ai pas fait. Ce qui marchait pour Skynyrd ou Blackfoot ne marcherait pas forcement pour moi et, donc, si je veux être pertinent, je dois faire mon propre plan de carrière, vivre selon mes critères sans regarder si jamais j'obtiens de la reconnaissance de quelqu'un.
Bien que j'apprécie beaucoup le talent de Ricky Medlocke et encore plus toutes les gentilles choses qu'il a toujours fait pour moi, je sais qu'à la fin, comme pour tout artiste, tout se résume à mon talent, ma détermination, mon dévouement et à la manière dont je joue les cartes que la vie m'a mises entre les mains.
La plupart des morceaux des deux disques sont du groupe et, en particulier, de vous, Russell. Pouvez-vous nous parler de l'écriture ?
La raison pour laquelle on m'a demandé de venir à Shoals était mon écriture. Johnson a vu quelque chose dont il a senti, je suppose, que c'était du talent. J'ai écrit des chansons dès mon enfance puis quand je grandissais durant les sixties. Je savais que le succès des Beatles avait inauguré une ère où on attendait que les artistes qui enregistrent soient des auteurs compositeurs. C'était différent des années cinquante quand Elvis et d'autres enregistraient les chansons écrites par d'autres. J'avais aussi l'impression que c'était là où était l'argent. J'ai grandi dans une telle pauvreté que l'argent ou l'espoir d'en faire était important pour moi.
D'habitude, je commençais le processus avec une idée de paroles ou même un texte complet. Souvent, je servais aussi de manager au groupe et je n'avais donc à vrai dire pas le temps de me poser et "d'écrire". En conséquence, je composais les paroles dans ma tête en conduisant ou en voyageant, je les passais à Dennis ou Tommy et ils faisaient la musique. Souvent, je n'entendais pas le produit final avant que le groupe n'essaye de jouer le morceau live. On jouait toujours les morceaux live avant d'aller avec en studio.
Aujourd'hui, j'aime écrire avec des collaborateurs comme Johnny Neel et mes collaborateurs favoris sont toujours Dennis et mon vieil ami Collins Kirby. J'écris aussi pas mal par moi-même, surtout parce que je me suis fatigué d'avoir un catalogue de chansons que je ne pouvais jouer seul. J'écris donc actuellement plus de musique. Une bonne partie de "Back To The Swamp" a été écrit seul mais, souvent, Dennis faisait des suggestions et, de nouveau, on écrit d'avantage ensemble.
Le disque a-t-il été un succès commercial ?
Non, pour plusieurs raisons. Je pense pouvoir vous l'expliquer : les deux raisons les plus importantes auxquelles je pense sont, tout d'abord, qu'une nouvelle ère voyait le jour dans la musique populaire avec la "new wave" et l'accident d'avion de Skynyrd en Louisiane. Ils étaient les plus importants porteurs de la torche du rock "sudiste" de l'époque. Ça a marqué la fin d'une époque. Deuxièmement, le contrat Capitol/MSS était nouveau et les deux compagnies n'avaient pas travaillé ensemble depuis assez longtemps pour développer de bonnes stratégies promotionnelles. Cette compagnie n'était pas assez forte pour vraiment faire percer un groupe inconnu comme Highway. La plupart des groupes qui tournaient et qui semblaient percer avaient deux ou trois LPs avant de voir le succès. Notre contrat a été terminé avant que le second LP puisse voir le jour.
Y a-t-il quelque part des pistes restées dans les tiroirs ?
Oui, il y a au moins un ou deux CDs potentiels. Certains morceaux sont à l'état de "démo" mais certains sont certainement assez "bons" pour être sortis, surtout le matériel que nous avions enregistré pour préparer le second Capitol/MSS. Ces morceaux ont été principalement écrits parce qu'on avait été en tournée avec des groupes remuants et hard comme Ted Nugent. On savait que si on allait ouvrir pour ce genre de groupes, il fallait envoyer la sauce. Les morceaux ont donc été écrits avec en tête les performances live et l'énergie.
Il me semble que le LP n'est pas sorti en CD. Est-ce en projet ?
Non, ça n'est pas sorti en CD. Il y a quelques discussions au sujet d'une compilation à sortir l'an prochain (2007) à l'occasion du trentième anniversaire de la sortie du premier LP.
Avec quels groupes avez-vous partagé la scène ?
On a joué avec Ted Nugent, UFO, Triumph, Blackfoot, Mother's Finest, Alabama, B.J. Thomas, Nantucket, Wet Willie et, mon dieu... beaucoup d'autres, chacun individuellement.
Quels sont vos souvenirs de la vie en tournée ?
Il y en a tant mais la plupart ont trait aux membres du groupe. Comme je le disais plus haut, on était souvent dans une si mauvaise situation qu'on devait vraiment faire corps ensemble pour juste survivre et c'était un rêve en commun qui continuait à avancer malgré tous les coups du sort.
Quelle a été la vie de Jackson Highway après le second disque ? Quand, comment et pourquoi le groupe a-t-il splitté ?
Après la sortie du second LP et qu'il ait été considéré comme "mort" par le label, ils nous ont fixé une "audition" pour le nouveau répertoire. La semaine de l'audition, notre père à Dennis et moi décéda. On a manqué l'audition et certains des membres du groupe choisirent de rentrer chez eux.
Dennis et moi avons eu un contrat avec MSS comme auteurs, pour écrire pour un nouveau contrat discographique. Avant qu'on n'ait eu l'opportunité de matérialiser ça, Barry Beckett partit pour Nashville comme producteur et MSS fut vendu à Malaco. Notre contrat fut rompu et Dennis et moi avons donc choisi de partir pour Nashville. Teddy Gentry de Alabama nous l'avait suggéré. On était endettés et on avait là les meilleures chances de trouver du travail comme musiciens.
Très peu de temps après avoir déménagé à Nashville, Ronnie Vance et Britt Meachman nous rejoignirent pour former Jackson Highway à quatre. Cette réunion de tous les membres d'origine a bossé à Las Vegas, dans le Midwest et sur la scène des clubs de Nashville.
À la suggestion de Barry Beckett, alors à Warner Brothers, on avait prévu de rester proche des studios et de Beckett pour essayer d'aller vers un nouveau contrat. Cela signifiait de ne pas partir en tournée pour être disponibles pour le label. Jimmy Johnson produisit une autre session "démo" pour nous afin de la proposer à Beckett et Warner Brothers. (L'ensemble des cinq membres de Jackson Highway joua lors de ces sessions.) Quand le groupe réalisa qu'on allait avoir à repartir de tout en bas pour gagner les faveurs d'un nouveau label, quelques membres choisirent de quitter le groupe. Dennis et moi avons décidé qu'on devrait travailler par nous-mêmes plutôt que d'investir émotionnellement dans un autre effort avec un groupe.
Êtes-vous toujours en relation avec les autres membres du groupe ? Que sont-ils devenus ?
Oui, on reste toujours amis. Je pense que d'abord, après la séparation, comme dans beaucoup de relations, on avait chacun à nous trouver nous-mêmes et à commencer à planifier une trajectoire qui corresponde à nos individualités.
J'ai commencé à travailler de nouveau comme sideman, comme je l'avais fait d'autres fois dans ma carrière. Cette fois, je travaillais pour Margo Smith, une star country des seventies avec pas mal de hits à son crédit, qui était stable et bossait pas mal. Je me suis marié et après la naissance de ma fille, Amanda, je suis retourné à Fort Payne pour continuer ma "recherche d'âme". J'étais profondément impliqué dans la communauté régionale artistique comme responsable de programmation artistique, chercheur de la vie populaire, artiste éducateur des arts dans l'éducation et administrateur des arts publics.
J'ai toujours joué localement chaque fois que je le pouvais et je me suis orienté vers une activité d'artiste et d'auteur compositeur solo. Dennis et moi avons continué à composer ensemble et comme il restait présent sur la scène de Nashville, il est devenu mon point de contact pour rester en lien avec l'industrie musicale. On a écrit des morceaux pour Mike O'rear's Publishing, le type qui dirigeait MSS Publishing Company quand on est arrivé à Muscle Shoals.
Dennis est resté présent sur la scène des clubs de Nashville et a commencé à capitaliser une sacrée réputation dans le coin. Il a été couronné de succès pendant un moment comme chanteur de pubs et est devenu le leader d'un groupe d'un des night-clubs de Nashville qui a connu le plus long succès, le Starlite. Là, il était en contact constant avec les meilleurs musiciens passant en ville à la recherche de travail comme accompagnateurs ou artistes.
Britt est retourné à Mobile et a commencé à travailler dans les clubs là-bas. Britt, plus tard, a tourné aux Etats-Unis et au Japon avec Little Milton Campbell avant de rejoindre son groupe actuel, signé chez Malaco : The Beat Daddys. Britt est maintenant avec eux depuis un bon bout de temps. En fait, quand j'ai décidé de travailler de nouveau, j'ai joué de la basse pour le groupe pendant quelques années. J'ai écrit un morceau, "Miss Dixie" pour leur CD "Delta Vision". Ça a été quand j'étais avec eux que j'ai commencé à travailler à mes propres démos.
Tommy Patterson est resté à Muscle Shoals à travailler comme musicien de session et à bosser dans les clubs du coin. Il s'est aussi beaucoup absorbé dans l'informatique. Il a été un des premiers à faire de la programmation de pistes pour la publication de démos. Il tourne avec différentes formations ou artistes, dont le légendaire Little Richard. Avec ses talents d'harmoniciste, il a joué sur des enregistrements de Sawyer Brown, Jimmy Buffett et sur mon CD "Back To The Swamp". Tommy a joué dans plusieurs clubs et différents festivals avec moi, ces dernières années.
Ronnie Vance vit toujours à Shoals. Il était le seul originaire de là-bas. Il a travaillé dans les clubs pendant bien des d'années et maintenant c'est un homme d'affaires couronné de succès. Je viens le saluer chaque fois que je vais là bas. Lui et Tommy ont bossé ensemble dans des groupes de clubs à Shoals.
Dans une interview au magazine français Blues & Co (n°34, décembre 2005), vous sembliez amer au sujet de cette expérience et de la fin du groupe. Pourquoi ?
Je n'avais pas l'intention de sembler amer. J'ai investi émotionnellement ma vie dans cet effort et ça m'a vraiment fait mal quand j'ai réalisé qu'après tout ce à travers quoi nous étions passé, certains d'entre nous ne voulaient pas continuer. Barry Beckett, une légende en lui-même et avec suffisamment de contacts, voulait toujours travailler avec nous, ce qui nous laissait une bonne chance de trouver un autre contrat. Il aurait fallu de la persévérance, du dévouement et travailler durement mais regardez ce qu'a traversé Blackfoot avant de percer... trois labels. Ou encore, Delbert McClinton.
Je n'avais littéralement pas un rond de côté. J'étais affamé de succès et j'aurais travaillé le reste de ma vie pour ça. Avec Jackson Highway hors circuit, j'ai du reconstruire ma propre confiance et apprendre à survivre avec la seule chose que je savais vraiment faire... la musique. En même temps, je devais nourrir une famille en travaillant un minimum, avec souvent deux jobs en même temps et en jouant quand je pouvais.
Je ne suis pas le seul qui ait dû apprendre à survivre. Comme chercheur en musique populaire, j'ai étudié pas mal d'artistes qui ont travaillé dur et continuent à perpétuer la tradition sans les bénéfices financiers qu'un gros hit apporte souvent. Ces artistes sont les seuls qui comptent vraiment pour que la tradition et la culture soient transmises à la prochaine génération. Les artistes qui ont du succès dans la musique populaire se trouvent souvent aussi à avoir à survivre aux machines à faire des disques de notre culture pop et à construire une vie ensuite.
J'admire vraiment de tels artistes qui sont là pour la "longue route", ce sont de vrais artistes. Et j'ai été honoré d'avoir été considéré comme l'un d'eux. Je suis là pour la "longue route"... parce que c'est ce que je suis.
Qu'avez-vous fait après ?
Je continue à travailler, écrire, jouer, enregistrer... à être un artiste musicien. Je devrais peut-être faire d'autres choses aussi pour payer les factures mais quoi que ça me coûte, je serais là tant que Dieu me permettra d'avoir la santé.
Avec un peu de chance, j'enregistrerais bientôt de nouveau pour une sortie à l'automne 2006 ; j'ai des plans pour une sorte de réalisation commémorative pour Jackson Highway en 2007. J'ai aussi prévu de m'impliquer, de différentes manières, dans la communauté artistique, localement et régionalement. Je vais continuer mes études de la vie populaire. Je serais un homme très occupé mais pas assez occupé pour ne pas tourner en France si l'opportunité se présente !
Comment avez-vous rencontré Johnny Neel ?
J'ai un frère, Randy, qui voyageait souvent avec Jackson Highway comme régisseur scène ou ingénieur du son. Au fil des ans, Randy a travaillé avec pas mal d'artistes, comme ingénieur dans un club de Nashville. Il a rencontré Johnny et a commencé à l'assister dans l'installation de son studio d'enregistrement, Straight Up Sound. Randy présenta Dennis à Johnny et Dennis a ensuite commencé à travailler avec Johnny comme directeur et ingénieur de son studio. [NDLR : regardez les crédits du récent disque de Neil Carswell !]
Comme je le disais plus tôt, Dennis et moi avons toujours continué à écrire ensemble. On a donc réservé Johnny et le studio pour faire quelques démos. C'est à ces sessions que j'ai d'abord rencontré Johnny. Il semblait aimer mon écriture et pensait que ce serait bien d'écrire ensemble.
Il a enregistré un de vos titres, vous avez joué ensemble. Est-ce une collaboration proche ?
On a su que Johnny a dit que les frères Gulley sont comme de la famille pour lui et on sent la même chose. Depuis que Dennis a commencé à travailler avec lui, et aussi Randy, j'ai toujours pu circuler autour du studio et mettre à disposition tous mes talents pour les projets en cours.
J'aime vraiment être dans l'entourage de Johnny et je suis honoré que, quand j'ai un concert auquel il peut participer, il le fasse. Même chose avec Doug Jones et Chris Anderson des Outlaws et de Blackhawk. Je suis chaque fois honoré de les avoir avec moi sur scène. Ils semblent aussi l'apprécier. Ils sont mon équipe A et si il y a la moindre date significative, je les appelle en premier. Ils sont occupés et parfois sont déjà pris pour d'autres concerts mais s'ils sont disponibles, ils veulent toujours me soutenir.
Je pense qu'une des choses les plus flatteuses que quelqu'un ait dit sur moi est la fois où, dans une interview, Johnny a fait référence à moi comme "the real thing". Il écoute pas mal mon CD et dit la même chose : "c'est un vrai disque". Si Johnny Neel peut sentir une qualité authentique en moi et dans ma musique, je dois alors être quelque chose. Neel et Anderson n'ont pas à jouer avec moi, ils se font certainement plus d'argent avec d'autres, mais ils jouent avec moi.
Est-ce une collaboration proche ? Quand quelqu'un de talentueux comme Johnny Neel ou Chris Anderson travaille avec vous, il est judicieux d'écouter ce qu'ils ont à dire. Ils sont parmi les plus talentueux que je connaisse. Ils me laissent mener mais j'écoute toujours.
Vous avez sorti un premier CD en 2004, "Back to the Swamp". Pourquoi seulement aujourd'hui ?
Quand j'ai commencé à vouloir travailler d'avantage comme interprète, un enregistrement est devenu plus important pour assurer des dates. Au départ, c'était le but principal mais après avoir quitté les Beat Daddys, j'ai commencé à vouloir faire quelque chose que mes enfants pourraient écouter et peut-être comprendre mieux ce qu'est leur père. J'ai perdu mon père et je sens qu'il y a tant de choses que j'aimerais savoir de lui. J'ai donc voulu un enregistrement pour mes filles.
C'est vraiment surprenant comme ce CD semble aller plus loin que je ne l'avais prévu à l'origine. Je n'ai jamais attendu qu'il devienne un hit géant mais la façon dont il a été reçu a ouvert pour moi tant de portes pour des opportunités de reprendre une carrière active d'artiste.
Le style de ce disque est du blues acoustique avec d'autres composants comme le gospel. Pouvez-vous nous en donner les raisons ?
Bon, j'ai écouté et joué pas mal de musique dans ma vie. Comme adolescent, c'était du gospel et du rock and roll. Comme jeune homme revenant du Vietnam, c'était la soul et le rock. Au milieu de ça, le blues a toujours été à la racine de toute la musique que j'ai jouée. Je pense donc que si je devais faire de la musique honnête, toutes ces influences devaient y figurer.
J'ai choisi de le faire en acoustique parce que je voulais le faire d'une manière qui ne soit pas seulement orienté roots mais d'une manière qui me permette d'utiliser ma voix comme mon instrument. C'est pourquoi j'ai fait le morceau "Gospel According to the Blues" a capella. Je ne voulais pas seulement m'appuyer fortement sur ma voix mais je voulais aussi que dans ses paroles elle raconte un peu d'où je viens.
Sur ce disque, parmi les musiciens, on peut noter votre frère Dennis, l'ancien clavier de Jackson Highway Tommy Patterson (à l'harmonica), Johnny Neel et Chris Anderson des Outlaws ; Comment se fait-il que Chris joue avec vous ?
Johnny et Chris travaillent pas mal ensemble et Dennis utilise pas mal Chris en sessions. Quand, au début, j'ai décidé de faire un disque acoustique, j'ai d'abord voulu engager Jack Pearson (Allman Brothers) pour jouer de la resonator parce que j'aime le boulot qu'il a fait sur le CD de Jimmy Hall "Rendezvous with the Blues". Johnny et Jack étaient prévus pour la session live et nous choisîmes trois titres pour commencer. Jack a été appelé pour une session "d'équipe A" et c'est tombé le même jour que la mienne.
Dennis a suggéré Chris comme remplaçant. La session s'est si bien passée que Chris a joué sur tout le CD. Je suis content : il a vraiment fait que les parties de guitares "brillent". Chris a depuis joué plusieurs dates pour moi et c'est un ami formidable. Il ne sait pas combien je l'apprécie.
Dans Jackson Highway, vous jouiez de la basse et Dennis était le chanteur. Ici, c'est le contraire. Vous ne jouez plus de basse ?
Oui, je joue de la basse quand je joue dans les clubs avec une section rythmique et que je ne peux avoir Dennis et mon équipe A de Nashville. J'ai toujours aimé la basse mais en réalité la section rythmique est habituellement meilleure quand Dennis joue parce qu'il travaille nettement plus que je ne l'ai fait ces dernières années et il peut rendre la section vraiment solide pendant que je me concentre sur le chant.
C'est assez différent d'être maintenant le seul devant. De nouveau, j'ai vraiment de la chance que quelqu'un de talentueux comme Dennis travaille avec moi. Dennis est peut-être mon plus grand supporter. C'est mon producteur, mon co-auteur et mon partenaire. À côté de ça, c'est un super frère.
Avez-vous dans vos projets l'idée d'une réunion de Jackson Highway ?
J'aimerais faire quelques dates en 2007 en tant que Jackson Highway et j'ai commencé à parler avec les gars au sujet de cette possibilité. Il faut juste attendre et voir si ça se fait.
Vous avez un CD électrique, "Rockin' the Blues". Quand a-t-il été enregistré et pourquoi n'est-il pas sorti ? Pouvez-vous nous décrire un peu ce disque ?
Ce projet "Rockin' the Blues" est celui que j'ai commencé quand je tournais comme bassiste des Beat Daddys. En fait, quelques morceaux étaient à l'origine des morceaux qui devaient être des Beat Daddys. Britt joue de la guitare et Larry Grisham joue de l'harmonica. Larry ne pensait probablement pas qu'elles sonnaient suffisamment Beat Daddys, bien que le morceau "Miss Dixie", co-écrit avec Larry, ait été réenregistré pour leur disque "Delta Vision".
Britt joue sur la plupart des pistes de guitare. Dennis fait la basse. Il y a quelques batteurs, Neel joue des claviers, etc. Dennis et moi avons écrit les chansons. Un ami, Collins Kirby, en a co-écrit quelques-unes.
Comme je le disais, les Beat Daddys ont repris mon morceau "Miss Dixie" et le bluesman Carl Weathersby a repris "Nothing Hurts A Man Like A Woman Can". Deux de mes morceaux sont donc sur les disques d'autres artistes.
La raison pour laquelle ça n'est pas sorti a été que j'ai vraiment été inspiré pour faire "Back to the Swamp". si on peut garder l'esprit des enregistrements d'origine , il se peut qu'on refasse les morceaux avec quelques instruments acoustiques ajoutés pour que les gens qui ont acheté "Back to the Swamp" ne soient pas trop dépaysés. Sinon, il se peut qu'on le sorte inchangé plus tard. J'aimerais avoir aussi mettre mes versions des chansons qui ont été reprises.
J'écris tout le temps et j'ai donc pas mal de matériel que je veux enregistrer. C'est pourquoi je veux un nouveau CD. Peut-être qu'une partie du répertoire de "Rockin' the Blues" pourrait servir à une réalisation de Jackson Highway si on décidait aussi de faire de nouveaux enregistrements. Il y a pas mal de possibilités.
J'aimerais connaître vos groupes favoris de rock sudiste ?
De loin en numéro un : Blackfoot : l'énergie pure et la force de leurs enregistrements et de leurs performances live. Le chant de Rick est toujours stupéfiant. Je les joue pas mal quand je veux que ça bouge. Il n'y a pas d'autres groupes comme eux. Repose en paix, Jackson.
En deux, les Allman Brothers, ils ont tout fait commencer.
En trois, Drive By Truckers. Le futur est là.
Merci beaucoup.
Merci à vous et à quiconque en France nous aide à préserver cette musique. J'apprécie tout votre support et votre intérêt.