John Rehmel
Southern Thunder Project
Publié dans Bands Of Dixie n°105 (juillet - août 2015)
Le rock sudiste, c’est traditionnellement une affaire de groupes et ceci peut-être encore d’avantage qu’ailleurs. Le terme « Band » est d’ailleurs utilisé fréquemment dans les noms des formations sudistes et puis feuilletez le n°50 de votre magazine préféré et vous verrez que l’ensemble des cinquante meilleures galettes a été réalisé par des groupes. Mais voici qu’apparait maintenant une autre forme d’organisation créatrice, toujours collective, mais plus ponctuelle et regroupant des musiciens de différents horizons. Ce fut d’abord Brothers Of The Southland puis Dixie Tabernacle et – dans une certaine mesure – Dusty King James et voilà maintenant le Southern Thunder Project. John Rehmel nous raconte ce projet.
Bonjour John,
Qui êtes-vous ? Je sais que vous êtes un auteur-compositeur, mais pourriez-vous vous présenter un peu plus ? D'où êtes-vous ? Quelle est votre parcours musical ?
Je m’appelle John Rehmel et je suis d’Hymera dans l’Indiana. J’écris des chansons depuis longtemps et, tout récemment, j’ai décidé de de faire un album avec mes chansons à l’aide de quelques grands musiciens ; ceux qui composent le Southern Thunder Project, qui est à base de Southern rock et de blues.
Êtes-vous auteur-compositeur à plein temps ?
Oui et j’espère que le nouvel album m’aidera à me faire connaitre et que, à terme, certains de mes morceaux se retrouveront sur les albums d’autres artistes.
J’ai lu il me semble qu’avant ce projet, vous écriviez plutôt dans une veine country ?
J'ai écrit quelques morceaux country mais pas cette fois... cet album, c’est purement du Southern rock pur et du blues rock.
Êtes-vous aussi un musicien ?
Je gratte mais je ne suis pas un super guitariste. Assez bon cependant pour composer des chansons. Je joue beaucoup dans le but de m’améliorer. J’aimerais devenir assez bon pour pouvoir monter sur scène avec certains groupes. En attendant, je vais me cantonner à l’écriture des morceaux et à m’entrainer.
J'ai lu que l'idée de ce disque a été suggérée par Greg Martin des Kentucky Headhunters...
Oui, Greg Martin, l’excellent guitariste des Kentucky Headhunters, m'a inspiré l’idée de ce projet d'album. J’étais dans une période difficile où je tentais d’obtenir que des artistes enregistrent mes morceaux sur leurs albums alors il m’a dit « pourquoi ne fais-tu tout simplement pas ton album à toi avec tes morceaux ? »... Alors j’ai fait appel à certains musiciens de haut niveau et nous avons commencé à rocker en studio.
Ce type de projet n’est guère habituel mais je remarque qu'un autre membre des Kentucky Headhunters, Doug Phelps, fait partie d'un projet similaire, le Dixie Tabernacle de Larry Goad. Vous le connaissez ?
Oui, Doug joue avec Dixie Tabernacle quand il n’est pas sur scène avec les Kentucky Headhunters. Larry Goad est un type super tout comme Jimmy Hall. Il me semble qu’Ed King du légendaire Lynyrd Skynyrd a fait quelques shows avec eux. Greg Martin a aussi son groupe, le Greg Martin Group, quand il ne brûle pas les planches avec les Kentucky Headhunters.
Connaissiez-vous Otis avant le projet ?
Oui, Greg Martin a produit leur premier album. Greg et Jimmy Hall ont tous deux joué dessus et c’est un très bon disque. Je pense qu’Otis est l'un des meilleurs groupes par là-bas. Je suis allé dans le Kentucky et j’ai vu Otis jouer ... Ils sont extraordinaires et sont promis au plus bel avenir. Ils sont jeunes et ont les dents longues. Je suis très heureux qu'ils soient aussi impliqués dans Southern Thunder Project.
Comment les avez-vous convaincus de venir faire ce projet ?
Je n’ai pas eu tellement à les convaincre de faire le projet. Ils aimaient les compositions que je leur ai montrées. À tel point que Boone Froggett et Steve Jewell Jr. s’y sont impliqués et partagent avec moi les crédits de songwriting sur l’album. Boone a coécrit six chansons avec moi et Steve six autres.
Avez-vous écrit toutes les paroles ? Un peu de musique ?
J’ai écrit les paroles et j’ai assumé la direction musicale en ce qui concerne la façon dont les morceaux devaient se faire. Boone et Steve ont fait un travail impressionnant au niveau de la création des musiques. Ils ont modifié parfois un mot ou deux pour adapter le phrasé à la musique, un tuc qui arrive lors du processus d’écriture des chansons. Les chansons ont été écrites très rapidement. On est très heureux de la façon dont les chansons sont nées.
Vous avez appelé aussi Gary Jeffries. Comment avez-vous fait sa connaissance ?
Gary et moi avons parlé chansons pendant un certain temps sur Facebook. Il est aussi de l'Indiana et le courant est passé tout de suite entre nous. Gary a sauté à bord et il a fait sept morceaux sur ce projet contre six à Boone.
Il n'a rien écrit ? Certaines des morceaux qu'il chante me rappellent son CD solo ou ceux d’Alligator Stew. J’ai l’impression qu’il a imprimé sa marque sur les morceaux. Mon impression est-elle fausse ?
Gary a écrit le refrain sur « Full Throttle Heart », le morceau éponyme du disque. Mais oui, il a fait ces chansons siennes et j’étais sûr qu'il le ferait. C’est un grand auteur et il sait comment fabriquer et jouer un morceau.
Il est venu avec sa section rythmique et sauf sur un morceau ou deux, vous avez utilisé un même noyau de joueurs avec Fletcher, Trent et Jewell. Était-ce pour garder une unité à l’album ?
Oui, nous avions grand batteur en la personne de Gary Randy Trent et un tout aussi talentueux bassiste, Steve Fletcher, pour avoir des fondations en béton armé. Ils se connaissent bien et ils ont fait un super boulot avec Boone, et Steve Jewell Jr. Le batteur d’Otis, Andrew Gilpin, a également joué sur deux plages. Comme ils ont joué ensemble tout le long des sessions, il y avait une profonde osmose entre eux.
Pourriez-vous présenter Larry Velez ?
Larry Velez est né et a grandi à Dallas et vit maintenant dans l'Indiana ... C’est un grand guitariste et tout ce qu’il fait sur cet album est superbe. Larry peut tout jouer de Stevie Ray Vaughan et Eric Johnson à Santana et aux légendes du rock sudiste ou de la country. Il joue sur trois titres du disque et je suis honoré qu’il l’ait fait. J’espère que les gens vont entendre d’avantage parler de Larry à l'avenir.
Et qui est Chris Walker ?
Chris Walker est mon ami de longue date sur Facebook, il vient d'Angleterre. C’est encore un guitariste qui figure parmi les meilleurs. Chris joue sur quatre titres ; il me rappelle Stevie Ray Vaughan et Rory Gallagher. Il a par ailleurs son groupe à lui, le Chris Walker Band. Chris travaille à des choses nouvelles tout comme Gary Jeffries et OTIS. Ils vont tous bientôt proposer aux fans de super trucs.
Comment avez-vous choisi qui jouerait sur chaque morceau ?
J’ai pris Boone Froggett pour les chansons que nous avons coécrit, sachant que se seraient les plus bluesy et blues rock. Les sept titres que Gary Jeffries chante, je savais qu’ils conviendraient mieux à son approche rock sudiste. Le reste s’est mis en place naturellement, tout le monde connaissant bien le projet.
Combien de temps pour préparer tout avant les sessions ?
Croyez-le ou pas, ces types ne s’étaient jamais rencontrés auparavant. Ils ont tous eu des démos brutes avec l’idée prévue pour les morceaux mais, en fait, le courant est passé de manière étonnante dès qu’ils se sont rencontrés. La première chose qu'ils ont fait, ça a été une jam d’un titre connu de tous, le « Whipping Post » des Allman Brothers. C'était génial ! Ils ont jammé comme s’ils se connaissaient depuis des années.
L’avez-vous enregistrée ?
Non, mais tout l'album a été enregistré par Curt Hall aux studios Chief Lemon Head Studio, dans l’Indiana.
Pourquoi l’avez-vous choisi lui ?
Je connais Curt Hall depuis l’enfance. Il a grandi à quelques kilomètres de chez moi et Curt est dans la musique depuis plus de trente ans. Je savais donc que son expérience lui permettrait de capturer le son que nous voulions.
Vous avez fait deux sessions je crois ?
Oui, nous avons fait la première session en août avec Boone Froggett, Steve Jewell Jr., Randy Trent et Steve Fletcher. La deuxième session s’est tenue en octobre avec Gary Jeffries, Andrew Gilpin et la même équipe. Chris Walker et Larry Velez ont ajouté leurs solos de guitare plus tard, après ces deux sessions.
La première session, c’était plus pour répéter ?
Je dois préciser que ça a été enregistré en 2014. Non, ils faisaient juste le morceau une ou deux fois et puis on enregistrait. Je pense que c’est plus naturel et authentique comme ça, que ça a plus de force. Boone et Gary ont refait ensuite leurs voix. Il y eu quelques parties instrumentales à corriger mais très peu. Les gars ont été formidables. Ils étaient vraiment en état d’osmose, ce qui est rare car ils ne s’étaient jamais rencontrés avant.
Combien d'heures en studio ?
Les premières sessions durèrent trois jours d'affilée et la première journée fut une journée de douze heures qu’ils n’ont pas mal employé avec les six chansons de Boone mises en boite Les deux journées suivantes, ça a tourné autour de dix heures chaque fois. Pour la seconde session en octobre avec Gary, ce fut presque la même chose.
Vous avez peut-être appris pas mal de choses en réalisant ce projet. A-t-il changé quelque chose dans votre processus d'écriture ou sur un autre plan ?
Il n'a pas vraiment changé ma manière de composer au niveau des mots mais Il m'a montré qu’il fallait que je m’améliore vraiment pour savoir comment la musique et les mots se marient de manière harmonieuse. J’ai tellement appris de tous les musiciens du Southern Thunder Project ! Il faut laisser son esprit ouvert aux idées des autres pour s’améliorer en tant que songwriter. Je pense que je m’améliore sans cesse.
Le packaging est également très réussi. Quelques mots à son sujet ?
Merci Luc. La pochette a été réalisée par Abbie Trent, l'épouse du batteur Randy Trent. Elle a fait un truc incroyable en s’inspirant du fait que le projet ressemblait à ce qu’on pouvait écouter sur les vinyles des seventies de classic rock. Elle a fait le devant et le derrière et tout à l'intérieur. Je suis tellement fière d'elle !
Comment faites-vous pour vendre le CD ?
Le CD est en vente seulement depuis quelques mois. C’est variable, il y a eu des hauts et des bas et ça commence à remonter à nouveau. Je sais que dans notre monde actuel, les budgets sont serrés. Il est difficile de sortir 11,99 dollars plus 2,95 pour le port, mais je pense que grâce à votre aide et celle d'autres journalistes dans les magazines plus les passages radio, le disque va se faire connaitre et que les gens verront c’est un très bon album.
Le vendez-vous uniquement par le biais de votre site Web ?
La plupart des ventes se font par le biais du site Internet mais on peut le trouver aussi sur CDBaby, iTunes et Amazon. Chez quelques vendeurs locaux ici aux États-Unis. Gary Jeffries Band prépare une tournée avec son groupe ; les gens pourront en acheter aux concerts. Je voudrais avoir des distributeurs en France, en Allemagne et en Suède voire ailleurs pour qu’on puisse se procurer l'album dans ces pays-là. Je travaille encore chaque jour pour que les fans sachent que cet album existe.
Y at-il certains morceaux que vous auriez enregistrés et qui ne sont pas sur le CD ?
Non, on a enregistré treize chansons et c’est tout. Cependant, il y avait d’autres compositions que j’aurais voulu qu’on fasse. J’en avais assez en stock pour double album mais je pense que treize chansons, c’est bien pour les fans.
Pensez-vous enregistrer un second volume ?
Si l'album se vend bien et si les fans sont vraiment demandeurs, alors c’est très possible. Mais, il faut que ça colle question timing. OTIS va pas mal tourner maintenant et le Gary Jeffries Band se prépare à prendre la route lui aussi. Il en va de même pour le Chris Walker Band. Ce serait vraiment génial de les avoir tous de nouveau en studio à l’occasion et de créer quelque chose à partir de ce qu’on a appris avec ce premier projet.
Ces morceaux auront-ils une vie en live, joués sur scène par un Southern Thunder Project Band ou alors, peut-être, par Otis, Gary ou d’autres, avec leurs propres groupes ?
Oui, le Gary Jeffries Band jouera les titres du Southern Thunder Project avec ses propres morceaux. Et, je crois OTIS fera bientôt un concert avec Gary Jeffries. En Juillet. Ces deux groupes ont de super chansons pour les fans, et j’espère que les fans vont le constater. Je pense qu’au fur et à mesure que les dates de concerts vont s’ajouter à leur calendrier de tournée, ils vont ajouter des titres de l’album à leur répertoire.
A propos de Gary, savez-vous quand il pense terminer son nouveau disque ?
Gary espérait avoir son nouveau CD terminé pour juillet pour le concert prévu chez lui, à Monticello, Indiana mais il sait ne pas précipiter les choses. C’est un pro et il préfère que ça prenne un peu plus de temps pour un résultat parfait. C’est parti pour être un sacré album !! Je suis prêt à parier que ce sera pour août 2015 ou début septembre.
Avez-vous des retours sur le CD d’artistes rock, country, blues, etc. ? Et comment est-il reçu par les médias ?
Oui, j’ai eu un grand soutien de l'ensemble des gars de Kentucky Headhunters. Randall Hall, ancien membre de Lynyrd Skynyrd m'a dit que c’était super. Des médias comme Southern Fried Magazine et RarasFarm Magazine ont porté beaucoup d’attention au disque. On a eu également eu des passages radio sur différentes stations et ont eu aussi des interviews radio diffusées. Je pense que de plus en plus de gens se rendent compte que le CD existe.
Vous resterez Je suppose concentré un certain temps sur le projet Southern Thunder Project mais avez-vous d'autres projets ?
Je suis toujours en train de composer des chansons et je suis en train de rentrer en contact avec quelques grands auteurs-compositeurs comme Justin McCorkle, Ryan King, Brett Mullins et d’autres. Ça va donner sous peu quelques autres superbes chansons.
Un grand nombre d’artistes historiques de rock sudiste sont décédés ces derniers mois. Croyez-vous en un futur du rock sudiste ? Et qu’en est-il du Southern rock dans l'Indiana excepté Gary et de votre beau projet ?
Bonne question ! Il y a encore du grand Southern rock de nos jours-avec Blackberry Smoke, Preacher Stone, Black Stone Cherry et OTIS quoique Black Stone Cherry soit plutôt hard rock mais quand même avec des racines sudistes et OTIS plutôt blues rock, mais avec des racines sudistes également... et il y a Le Curt Town Band. Les légendes sont toujours là. Je pense au Charlie Daniels Band, à Skynyrd, aux Outlaws, à 38 Special et au Marshall Tucker Band.... Je pense que le style est toujours « still alive and well » et que les gens sont en manque de rock sudiste. Ils veulent de la vraie musique, sincère et authentique, non frelatée et non ces trucs pop country qu’on nous impose et qui sont juste une machine à fric.
L’Indiana n’est pas une terre de rock sudiste. J’essaye d’apporter ma contribution en le présentant aux gens par ici. Pour revenir à votre question... Oui, je crois en l'avenir du Southern rock... il y a aussi les Georgia Satellites, Homemade Sin, Molly Hatchet... Je pense que certains jeunes groupes de rock sudiste vont émerger à l'avenir.
Et puis les Kentucky Headhunters aussi.
Pensez-vous qu'il soit possible de définir ce qu’est le rock sudiste ou est-ce quelque chose de flou ?
Je pense que si vous prenez à la fois de la country, du blues et du rock et que vous combinez ça, vous obtenez le rock sudiste. Je crois que le Southern rock, c’est la voix des hommes et femmes qui bossent dur. C’est pourquoi je pense qu'il est très populaire et qu’il le sera toujours. Les morceaux du Lynyrd Skynyrd de Ronnie Van Zant sont toujours aussi populaires et peut être même plus que jamais après pourtant une trentaine d’années depuis leur sortie. Ils écrivaient sur le gens normal et les fans s’identifient à eux comme ils l'ont fait aussi avec l'Allman Brothers Band.
Le rock sudiste des années 70 est-il le même que le rock sudiste actuel, celui que jouent Blackberry Smoke et d'autres nouveaux groupes ?
Je pense que Blackberry Smoke est le groupe qui perpétue la légende du rock sudiste des années soixante-dix. Je pense que Preacher Stone apporte cette même ambiance. Peu de groupes émergent en ayant cette capacité à retrouver le côté authentique et sincère de la musique des seventies. Et il y a toujours des artistes comme Gov’t Mule avec le grand Warren Haynes, ou encore Dickey Betts and Great Southern capables de « rocker ». Two Wolf est un autre nouveau groupe que j’aime aussi.
Eh bien, merci John pour ce Projet. Si vous voulez ajouter quelque chose...
Merci beaucoup Luc pour l’aide apportée à faire connaitre le Southern Thunder Project chez vous. Je tiens également à remercier tous les fans qui nous ont soutenus et j’espère qu'ils continueront à diffuser l’info et, qui sait, peut-être que les gars viendront faire « rocker » votre ville un de ces jours.
Ce serait cool !