Tommy Talton
We The People - Cowboy
Interview par Luc Brunot.
Traduction par Dominique Turgot et Luc Brunot.
Publié dans Bands Of Dixie n°92 (mai - juin 2013)
Après les aventures We The People et Cowboy dans les sixties et seventies, Tommy Talton avait disparu de nos écrans. Ce n'était que pour mieux rebondir ! Après un séjour en Europe, il s'est montré depuis quelques années très présent avec plusieurs projets comme la Capricorn Rhythm Section, la réunion de Cowboy et surtout une carrière solo tardive mais fort active. Pour notre plus grand plaisir !
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Bonjour Tommy,
Nous ne discuterons pas trop du passé mais nous avons quelques questions pour le résumer en quelques mots. Cowboy fut fondé en 1969 alors que le dernier enregistrement a été publié en 1977. Quand et pourquoi Cowboy s'est-il dissout ?
Nous avions exploré toutes les facettes possibles du travail créatif avec cette entité, aussi, en 1977, il est devenu évident qu'il était temps de passer à d'autres choses. C'était simplement une progression naturelle pour aller plus avant.
Quels sont vos meilleurs souvenirs de l'époque Cowboy ?
Bien qu'il y ait beaucoup de bons moments à retenir, l'un des meilleurs est d'avoir joué au Carnegie Hall à New York en accompagnement de notre vieil ami Gregg Allman et d'avoir enregistré un bel album live.
Pendant cette période, vous avez travaillé aussi en tant que musicien de studio (Bonnie Bramlett, Martin Mull, Corky Lang, Gregg Allman, Dickey Betts, Clarence Carter, Kitty Wells, Alex et Livingston Taylor, Arthur Conley, etc.). Était-ce très différent de travailler comme musicien de studio ou de jouer avec Cowboy ?
Travailler en studio est toujours un différent des concerts. Dans le studio, il faut être très attentif à la « conception » de la chanson et aux parties musicales appropriées pour construire la meilleure version. Par contre, lorsque vous êtes face au public, vous avez l'énergie du public et celui-ci vous le transmet. Cela entraine une certaine excitation que vous n'avez pas en studio.
Avez-vous travaillé uniquement pour Capricorn Records ?
J'ai aussi fait des enregistrements avec d'autres maisons de disques et d'autres artistes que ceux mentionnés plus haut. Ainsi, l'enregistrement avec Paul Butterfield pour le label Bearsville Records fut un plaisir.
En dehors de Cowboy et la Capricorn Rhythm Section, le trio Tommy Talton, Bill Stewart, Johnny Sandlin est le seul groupe que je connaisse où vous ayez été impliqué (à part comme musicien de session et à l'exception des groupes qui vous accompagnaient en tant qu'artiste solo). Y en a-t-il eu d'autres ?
À l'âge de seize ans, j'étais dans un groupe qui s'appelait We The People. Nous étions chez RCA Records et on avait des disques qui sont sortis en France à la fin des années soixante. Les enregistrements de We The People se vendent toujours auprès des fans de « garage bands ». Peut-être pouvez-vous les trouver à
www.www.sundazed.com.
En 1976, le trio sortait « Happy To Be Alive ». Pourriez-vous nous dire quelques mots au sujet de ce projet ?
Cette aventure a vraiment commencé par accident. Johnny Sandlin, Bill Stewart et moi étions assis dans le studio. On était en train de plaisanter et de discuter en attendant que Dickie Betts vienne poser quelques parties de guitare sur certains de ses morceaux. Et le temps a commencé à passer sérieusement. Alors, après un moment, Johnny m'a demandé si j'avais des nouvelles chansons que nous pourrions enregistrer, juste pour faire quelque chose puisque Dickie n'était pas là. J'ai toujours de nouvelles chansons ou des parties de nouvelles chansons en gestation... Nous avons donc enregistré une chanson intitulée « Help Me Get It Out ». Le lendemain, Johnny l'a amenée à Phil Walden, le président de Capricorn, et il lui a fait écouter. Phil a adoré et a dit: « Pourquoi ne continuez-vous pas tout simplement à faire un album complet ? » Cela nous allait très bien et VOILA [NDLR : en français dans le texte] que tout d'un coup, vous avez l'album « Happy To Be Alive » par TSS (Talton, Sandlin and Stewart).
Après l'aventure de Cowboy et de la faillite de Capricorn, je ne trouve plus trace de vous avant votre séjour en Europe dans les années quatre-vingt-dix. Que s'est-il passé à la fin des années soixante-dix et qu'avez-vous fait avant de venir en Europe ?
Dans les années quatre-vingt, j'ai passé mon temps principalement à produire certains projets au Texas et en Alabama avec différents et auteurs-compositeurs prometteurs. Je suis ensuite retourné dans ma ville natale, en Floride, et j'ai passé du temps à composer et à jouer avec des amis pour des concerts dans le coin. Ce fut un temps de réflexion pour moi. Je n'étais plus à ce moment-là très intéressé par le business musical.
Combien de temps avez-vous vécu en Europe ?
J'ai vécu au Luxembourg pendant environ neuf ans. On m'avait demandé de venir faire une tournée de six semaines avec le chanteur / compositeur Matt Dawson. Une fois la tournée avec Matt terminée, Chris Janssen, le bassiste, Peter Baron, le batteur et moi-même, nous avons voulu continuer. Nous avons appelé l'ami de Peter, le claviériste Mike Bell de Londres et nous avons formé les Rebelizers. Nous avons enregistré un CD à Shiffilange, au Luxembourg. On a fait des concerts en Allemagne, en Belgique et en France et on est resté ensemble pendant environ trois ans. Mike et Peter jouaient dans le groupe d'Albert Lee, Hogan's Heroes et ont commencé à être pas mal occupés avec ça. Quand je suis retourné aux Etats-Unis, j'ai créé des liens avec les gens du magazine Hittin' The Note. Ils ont écouté la musique des Rebelizers et ils ont voulu la mettre sur le marché américain. J'étais leur premier projet en tant que maison de disques et ça s'est avéré très agréable. Ce sont de braves gens avec qui il est agréable de travailler mais le succès continue toujours.
Quand vous étiez en Europe avec les Rebelizers, jouiez-vous sous l'appellation Rebelizers ou en tant que Tommy Talton & the Rebelizers ?
On s'appelait juste the Rebelizers.
Quelle est la signification de ce nom ?
J'ai créé ce mot. Ça vient du fait d'être un « rebelle ». Se rebeller contre quelque chose...
Avez-vous souvent joué en France ? Vous souvenez-vous des endroits ?
Je ne me souviens plus maintenant des noms des lieux. Ça date d'au moins quatorze ans.
Venez-vous toujours régulièrement en Europe ?
Je suis revenu en Europe en 2011 pour quelques festivals au Luxembourg ainsi que quelques concerts en Belgique et en Allemagne. Ill y a une possibilité que nous recommencions en juillet 2013.
Est-ce toujours avec les Rebelizers ?
2011, c'était le Tommy Talton Band. En 2013, ce le sera aussi ou alors ce sera un Tommy Talton Euro Band.
En 2006 est sorti « Alive At Music Hall 2nd Street » par la Capricorn Rhythm Section. Les chanteurs étaient Scott Boyer et vous-même. En conséquence, n'était-ce pas comme reformer Cowboy ?
C'était une sorte de retrouvailles mais pas vraiment Cowboy. Scott Boyer et moi avions discuté et chanté ensemble de temps en temps au fil des ans et ce n'était pas nouveau pour nous. Jouer dans un groupe avec Paul Hornsby et Johnny Sandlin procurait de belles émotions.
« Cowboy Reunion 2010 » est un excellent album live. Était-ce la première réunion depuis les seventies ?
Merci, je suis content qu'il te plaise. Oui, c'était le premier vrai concert de retrouvailles depuis trente-huit ans pour nous.
Randall Bramblett fait un travail fantastique sur ce disque mais il n'était pas un membre d'origine. Pourquoi vouliez-vous qu'il joue dans Cowboy ?
Randall Bramblett avait tourné au sein de Cowboy avec nous, alors il a joué le concert retrouvailles aussi. Il avait aussi joué des cuivres sur quelques sessions de cowboy au début des années soixante-dix.
Était-ce une réunion ponctuelle ou Cowboy va-t-il jouer régulièrement et peut-être enregistrer à nouveau ?
Cowboy a commencé à enregistrer un nouvel album studio en 2008 dans l'Alabama avec Johnny Sandlin. C'est la dernière fois que tous les membres originaux du début se sont réunis. Il y a des chansons qui attendent d'être terminées. Ça a pris du retard en raison de négociations commerciales. Peut-être ces enregistrements seront terminés et publiés un jour.
Est-ce que « Someone Else's Shoes », publié en 2008, était votre premier album en tant qu'artiste solo ?
« Someone Else's Shoes » est l'album que j'ai enregistré au Luxembourg avec les Rebelizers. Quand je suis retourné aux États-Unis, j'ai ajouté cinq nouvelles chansons à l'album et j'en ai éliminé trois provenant des sessions européennes.
Il a été sorti par les Rebelizers en 1995 et modifié et republié aux États-Unis en 2008.
Pourquoi n'avez-vous pas enregistré avant sous votre nom ?
L'opportunité ne s'est jamais présentée à moi. J'ai été très heureux de jouer dans des groupes, avec d'autres musiciens dans un processus « démocratique ».
Après « Live Notes From Athens », « Let's Get Outta Here » est votre troisième album pour Hittin' The Note. Les deux premiers ont été enregistrés avec les Rebelizers et le Tommy Talton Band. Pour le nouveau, vous ne travaillez pas avec un groupe resserré mais avec dix-huit musiciens. Pourquoi ce choix ?
David Keith, le batteur original du Tommy Talton Band, a un chouette studio au nord de Birmingham, en Alabama. Nous avions envisagé que j'y fasse un album acoustique et quand HittinTheNote m'a sollicité pour faire un autre projet, je suis allé voir David et nous avons décidé de faire cette session.
Nous avons commencé le 7 mai de cette année 2012 et ont a terminé à la fin août.
Le temps passé dans le studio s'est donc étalé sur tous ces mois mais, en réalité, il n'y a environ que quatorze jours qui se sont passés à enregistrer.
Je suis heureux d'avoir des amis musiciens si talentueux pour m'aider et ceci avec les différents aspects qui les caractérisent. Chuck Leavell et Paul Hornsby sont les meilleurs dans ce qu'ils font et l'harmonie entre Scott Boyer et ma voix est quelque chose dans laquelle je me sens très bien.
J'ai été surpris de voir Rick Hirsh jouer sur « Dream Last Night » (J'aime beaucoup son travail. Vraiment super.) parce que je n'ai pas vu son nom crédité sur disque depuis l'ère Capricorn. Il travaille encore dans le monde de la musique ?
Rick Hirsch est très actif dans le monde de la production musicale et autres. Il donne en outre des concerts occasionnels à Los Angeles.
Presque toutes vos chansons sur vos disques sont écrites seul. Vous n'aimez pas écrire en collaboration ?
Je ne crains pas d'écrire en collaboration avec d'autres ; ça ne se produit simplement pas souvent. Je ne recherche pas ça comme certaines personnes le font.
Une exception, qui figure sur votre nouvel album, c'est « You Can't Argue With Love », écrit justement avec Rick Hirsh. Avez-vous une relation spéciale avec lui ?
Rick m'a envoyé la démo d'une idée qu'il avait il y a environ un an et m'a demandé de voir si je pouvais la finir pour lui. Eh bien, j'ai bien aimé ce qu'il avait commencé et il a été assez facile pour moi de le finir. C'est ce « You Can't Argue With Love » sur le nouveau CD.
Avez-vous des thèmes de prédilection lorsque vous écrivez des chansons ?
Il y a beaucoup de façons différentes par lesquelles les chansons me viennent. Normalement, je vais juste m'asseoir avec ma guitare et les nouvelles « progressions » arrivent. Parfois, j'ai une ligne ou une idée et je vais essayer de continuer à partir de là. Parfois, les mots viennent en premier et parfois c'est la musique. Je n'ai pas de de méthode définie, je suis juste heureux d'avoir ces chanson venir du fond de moi.
Vous produisez le disque avec David Keith. Pourriez-vous nous le présenter ?
Comme je l'ai dit plus tôt, David était le premier batteur que j'ai embauché lorsque j'ai mis en place le Tommy Talton Band. Nous avons été présentés par Johnny Sandlin. Je savais que David serait le bon dès que Johnny me fit savoir qu'il était un très bon batteur. Nous avons maintenant réalisé différents projets musicaux ensemble depuis notre rencontre en 2005.
Comment avez-vous partagé le travail de production ?
Eh bien, David était l'ingénieur / producteur et j'étais le chanteur, auteur-compositeur / producteur. Nous savions tous les deux ce que nous voulions et nous avons partagé le travail en fonction de ce que chacun connaissait le mieux.
Vous utilisez une section de cuivres sur trois morceaux. Est-ce votre idée ou de Keith ?
J'ai grandi en écoutant du R & B, une musique où les cuivres sont prédominants. Je voulais mettre des cuivres sur d'avantage des nouvelles chansons mais je n'avais pas le budget cette fois ci.
Pensez-vous que votre chant et votre jeu de guitare ont évolués depuis les seventies ?
Je l'espère bien, je ne voudrais pas rester immobile.
Et le type de musique que vous avez envie de jouer ?
Oh, comme vous le savez, en réalité, il n'y a que deux sortes de musique, la bonne et la mauvaise. Ce n'est pas vrai ?
Je me plais à penser que je joue quelques bonnes choses. (Rires.)
Il y a beaucoup de variété dans les styles musicaux joués sur « Let's Get Outta Here ». Est-il possible de définir votre identité musicale sur ce disque ? Ou en général ?
C'est difficile pour moi de le faire. Je laisse simplement tout ce que j'ai absorbé en moi au fil des ans sortir quand le bon moment est là. Je pense que c'est là le travail de quelqu'un d'autre d'étiqueter la musique en un certain type ou genre.
Pourquoi avoir choisi « Let's Get Outta Here » (« Sortons d'ici ») comme titre du disque ?
C'est un morceau que j'ai écrit alors que j'étais coincé à la maison pendant un bon moment. Elle est venue comme ça un jour, alors que je jouais de la guitare. J'en ai fait le titre du CD parce que je pensais que ça s'adaptait à la photo que je voulais sur la pochette. C'est aussi simple que ça.
Souhaitez-vous dire quelque chose de plus sur ce nouvel album ?
Je suis très heureux avec les retours que nous avons eus. J'espère que tout le monde aura une chance d'entendre ça et que ça procurera aux gens beaucoup d'émotions. Tout, ici, s'est assemblé si naturellement. Ça semble être juste comme c'était censé l'être. J'espère que tout le monde l'apprécie autant que nous avons eu de plaisir à l'enregistrer.
Comment définiriez-vous le rock sudiste et que pensez-vous de cette appellation ?
Je n'ai jamais pensé que Cowboy faisait partie de ce qui a été appelé le rock sudiste. Nous étions plus rock californien, s'il une telle chose existe, country rock ou peut-être folk rock. J'étais là quand toutes ces histoires de « Southern Rock » ont commencé ; nous on faisait tout simplement ce qui est venu naturellement. On laisse les autres lui donner un nom mais nous avons eu beaucoup de plaisir à créer ça...
Quels sont vos projets maintenant ?
Je suis pas mal sur la route et j'ai déjà commencé à réfléchir sur le prochain projet d'enregistrement. C'est dans mon sang et ça me va très bien.
Pensez-vous un jour réaliser un DVD ?
C'est toujours une possibilité. J'aimerais ça.
Y a-t-il de bonnes bandes vidéo de Cowboy qui permettraient un jour de réaliser un DVD ?
Je ne suis pas sûr de ça. Je doute qu'il y ait beaucoup de vidéos de Cowboy.
Un grand merci, Tommy.
Merci à toi aussi Luc. Peut-être pourrais-je te voir si je retourne en Europe en juillet 2013. Misons là-dessus...